#Coupe du Monde des Clubs de la FIFA 2025

Juventus FC : le rôle novateur des défenseurs centraux dans le jeu

FIFA, 24 juin 2025

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« Laisser deux défenseurs centraux se projeter dans le dernier tiers est une innovation avant-gardiste en matière de coaching. Je connaissais l’approche qui consiste à donner de la liberté à un défenseur central, en raison de ses qualités individuelles, mais n’avais jamais envisagé un concept symétrique permettant à une équipe de laisser deux défenseurs centraux pénétrer dans les 30 derniers mètres simultanément dans le jeu. »

Le Groupe d’étude technique de la FIFA traque constamment les innovations tactiques. Dans cet article, Roberto Martínez, expert dudit groupe et sélectionneur de l’équipe nationale du Portugal, souligne comment l’entraîneur du Juventus FC, Igor Tudor – lui-même ancien défenseur central –, redéfinit et fait évoluer le poste lors de la Coupe du Monde des Clubs de la FIFA 2025™.

« Quelle idée lumineuse de l’entraîneur : utiliser les défenseurs centraux pour offrir à l’équipe un avantage tactique aux avant-postes, tout en conservant une structure équilibrée. Ils créent le surnombre sur les ailes et ouvrent des lignes de passe insoupçonnées dans le dernier tiers. Une idée brillante, bien que risquée. Ce concept fait des défenseurs centraux un véritable point d’ancrage pour l’équipe, à des endroits où ils ne sont pas censés se trouver en phase offensive », ajoute-t-il.

Rendement offensif des défenseurs centraux

Face au 5-3-2 d’Al Ain, la Juventus a adopté une formation en 3-4-3. Dans cette rencontre, les Bianconeri se sont distingués par l’importance, la responsabilité et la liberté accordées à deux de ses défenseurs centraux, Lloyd Kelly (n°6) axe gauche et Pierre Kalulu (n°15) axe droit, pour qu’ils se projettent en même temps sur les côtés.

Comme l’explique Martínez, « en phase offensive, Kelly et Kalulu ont été les joueurs qui ont créé le surnombre sur les ailes et, plus surprenant encore, dans les 30 derniers mètres. Des deux côtés du terrain, les défenseurs centraux et les milieux axiaux se sont servis de renversements de jeu pour permuter, perturbant les pistons d’Al Ain et permettant au duo de l’arrière-garde de se retrouver souvent en position de participer aux attaques aux abords de la surface de réparation. »

Kelly et Kalulu ont contribué aux actions offensives, se distinguant par leurs appels dans la surface de réparation, leurs centres, leurs passes dangereuses et leurs passes décisives, mais leurs montées et leur investissement offensif étaient le fruit d’un concept bien travaillé plutôt que d’une idée instinctive des joueurs.

Martínez montre dans les vidéos ci-dessous comment les deux défenseurs centraux évoluent sur le terrain à partir d’une position basse et moyenne, puis avancent en fonction de la progression du ballon.  

« Ils le font intentionnellement et disposent des qualités pour remonter rapidement le ballon et distribuer des passes dangereuses avec un minimum de touches. Grâce à des renversements de jeu, ils continuent tous deux à monter à mesure que le ballon progresse et, plus surprenant encore, ils s’installent dans les 30 derniers mètres, où la Juventus crée le surnombre parce que leur positionnement perturbe la défense adverse. Ces projections sont savamment orchestrées et se font de manière symétrique. »

(1/2) Vidéo 1 : la Juventus utilise deux de ses défenseurs centraux pour faire progresser le jeu et créer le surnombre dans le dernier tiers du terrain sur une action récompensée d’un but.
(2/2) Vidéo 2 : Kelly (n°6), le défenseur central gauche de la Juventus, dédouble et s’excentre dans le couloir gauche pour libérer de l’espace et permettre une occasion dans l’axe.

Mouvements offensifs différenciés

Bien que les deux défenseurs centraux aient participé simultanément aux attaques, leurs déplacements n’étaient pas les mêmes, servant chacun un objectif différent. Kelly, le défenseur central gauche, cherchait principalement à déborder le piston adverse par l’extérieur, ou à plonger jusqu’à la ligne de but pour délivrer des centres dans la surface de réparation. De façon assez remarquable, il a reçu cinq ballons dans la surface adverse dans le jeu, faisant mieux que tout autre joueur lors de cette rencontre, et onze entre le milieu de terrain et la ligne défensive adverse.

Kalulu, le défenseur central droit, a généralement eu tendance à repiquer dans l’axe pour participer à des combinaisons et créer le surnombre devant la surface. Occuper cet espace a permis à Francisco Conceição d’évoluer plus librement sur l’aile, où il a pu fixer les défenseurs dans des duels.

La technique des deux joueurs pour évoluer avec autant d’aisance dans ces rôles novateurs est soulignée par le fait qu’ils ont été les deuxième et troisième acteurs du match en termes de passes permettant de casser des lignes réussies (Kelly à 94,7% de réussite et Kalulu à 94,1%).

« Les velléités offensives des défenseurs centraux sont délibérées et l’entraîneur Igor Tudor les place au cœur de sa stratégie. L’intention des deux joueurs est similaire car leurs montées sont symétriques, mais c’est leur profil, c’est-à-dire leurs caractéristiques individuelles, qui fait que leur efficacité et leur influence sont légèrement différentes », précise Martínez.

Permutations et couverture défensive

Pour permettre à deux défenseurs centraux d’évoluer en toute confiance dans les 30 derniers mètres, il faut tenir compte de l’équilibre de la Juventus entre son animation offensive et sa couverture défensive. La discipline du troisième défenseur central, Nicolò Savona (n°37), et sa relation avec ses homologues de l’arrière-garde ont été fondamentales quant à la réussite de cette stratégie audacieuse, comme le détaille Martínez.

« Deux raisons principales expliquent le succès de cette tactique. Tout d’abord, lorsque Kelly ou Kalulu se trouvaient dans les 30 derniers mètres, leurs milieux de terrain les couvraient afin de maintenir une structure défensive solide et solidaire.  

La seconde, c’est la très grande influence de l’entraîneur, Igor Tudor, qui demande un marquage individuel sur les attaquants adverses à ses joueurs en couverture défensive. Les deux défenseurs centraux peuvent évoluer en toute confiance dans le dernier tiers, sachant que d’autres joueurs les couvrent. Ils sont jeunes et audacieux, et cette audace leur est instillée par l’entraîneur. »

Les vidéos ci-dessous mettent en lumière des exemples de permutations de joueurs qui permettent aux défenseurs centraux de monter, tout en maintenant l’équilibre numérique à l’arrière.

(1/2) Vidéo 3 : les milieux de terrain de la Juventus échangent leurs postes et prennent le relais défensif, ce qui permet à leurs défenseurs centraux de se projeter vers l’avant.
(2/2) Vidéo 4 : Tudor, l’entraîneur de la Juventus, impose à ses défenseurs un marquage individuel dans leur couverture défensive.

Synthèse

Pour Martínez, cette approche tactique caractéristique de Tudor est plus facile à mettre en œuvre en club qu’en sélection nationale.  

« La synchronisation nécessaire entre les joueurs pour couvrir deux défenseurs centraux qui se projettent engendre une mise en place trop chronophage, les sélectionneurs ne disposant bien souvent que de trois séances pour préparer un match international.

L’influence d'Igor Tudor ne doit pas être sous-estimée, surtout en tant qu’ancien défenseur central. Normalement, un entraîneur consolide et perfectionne le rôle dans lequel il avait l’habitude de jouer, mais lui le fait évoluer en un poste qui peut permettre de décider du sort des matches. La qualité des défenseurs centraux pour conserver la balle dans le jeu devient ainsi déterminante. »

Vidéo 5 : la Juventus utilise deux de ses défenseurs centraux pour faire progresser le jeu et créer le surnombre dans le dernier tiers du terrain sur une action récompensée d’un but.

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