Passes courtes sur six mètres par un joueur de champ et relances longues

Au cours de la Coupe du Monde U-17 de la FIFA, Qatar 2025™, notre Groupe d'étude technique a observé certaines évolutions intéressantes dans le choix des passes des gardiens de but. Pascal Zuberbühler, expert footballistique senior de la FIFA et ancien gardien de but, en évoque certains aspects techniques et tactiques.

• Augmentation du nombre de six mètres effectués par des joueurs de champ

• Augmentation importante du nombre de relances courtes sur six mètres

• Meilleure lecture du jeu affichée par les gardiens à travers leurs choix de passes

Par rapport à la Coupe du Monde U-17 de la FIFA2023™, on observe une hausse de 12% du nombre de six mètres effectués par des joueurs de champ. De plus, le nombre de relances aux six mètres jouées à ras de terre est passé de 17% en 2023 à 39% en 2025. En 2023, les six mètres donnaient lieu à des relances courtes, à mi-distance et longues. Toutefois, lors de Qatar 2025, il est fréquent de voir des joueurs situés de part et d'autre du gardien effectuer leur première passe vers lui, en particulier face à un pressing haut et agressif. Le gardien enchaîne généralement avec une passe relance (dans 54% des cas) ou à moyenne distance (34%).

Comme l'explique Pascal Zuberbuhler, « l'intelligence des gardiens de but joue un rôle important, car ils doivent avoir le sens du jeu et comprendre la dynamique du match au moment de choisir la passe à effectuer. Souvent, le gardien de but et les défenseurs centraux sont les joueurs qui effectuent le plus grand nombre de passes dans un match. Dans cette évolution du gardien de but vers une sorte de meneur de jeu, sa capacité à lire la situation et à décider de la meilleure option de passe est vitale ».

• Le destinataire de la passe est-il bon dans le jeu aérien ? 

• Le destinataire se trouve-t-il dans une situation favorable ? 

• Quel est son pied fort ?

• D'où va venir la pression sur le destinataire de la passe ?

• Aime-t-il recevoir le ballon dans l'espace ? 

• Est-il capable de recevoir le ballon dos au but pour le protéger et laisser à d’autres joueurs le temps de se rendre disponibles ?

« Il ne suffit pas de repérer le premier joueur libre et de lui transmettre le ballon. Le gardien doit lire les options qui s'offrent au destinataire et comprendre quel type de relance facilitera au mieux son action suivante en fonction de la pression qu'il est susceptible de subir. Le gardien doit connaître les points forts de ses coéquipiers et se placer à la bonne distance du ballon pour pouvoir effectuer la passe souhaitée. De la même manière, il est crucial pour les joueurs de champ de connaître les points forts de leur gardien de but et le type de relance qu’il est capable d’effectuer. »

Relance à mi-distance après une passe d’un joueur de champ
Dans la vidéo 1 ci-dessous, Pascal Zuberbühler met en évidence la technique, le sang-froid et l’intelligence tactique dont fait preuve le gardien tchèque Adam Paar (n°21), qui laisse venir son adversaire puis crée un angle de passe qui permet de briser la première ligne du pressing haut des États-Unis.

« La course de son adversaire l'empêche d’effectuer une passe à mi-distance ou longue, mais il aperçoit l’appel de son milieu axial et fait preuve d’une grande assurance pour créer l’espace nécessaire à la passe. Cette passe oblige l'attaquant droit des États-Unis à repiquer vers l’intérieur en direction du receveur, laissant le latéral gauche tchèque Lukas Vanek (n°8) libre de tout marquage. À la réception du ballon, le défenseur central Sebastian Pech (n°13) trouve Vanek, ce qui permet à la République tchèque de contrer le pressing agressif des États-Unis. »

Relance longue après une passe d’un joueur de champ
À la 77e minute, alors que l'Angleterre mène 2-0, le gardien de but Jack Porter (n°1) reçoit une passe courte de son défenseur central gauche, ce qui lui permet d’assurer son contrôle et d’être dans les meilleures conditions pour effectuer une excellente passe longue vers son avant-centre. Cette relance du cou du pied trouve la cuisse de l'avant-centre. Celui-ci réceptionne dos au but puis trouve un soutien qui joue à nouveau vers l’avant.

Dans la troisième vidée, Pascal Zuberbühler montre un exemple remarquable de gardien de but qui fait confiance à son intuition.

« Le défenseur central gauche de l'Autriche joue court pour son gardien Daniel Posch (n°21) qui contrôle le ballon et constate qu’il n’y a aucune vraie solution de passe vers ses défenseurs ou ses milieux de terrain. Il se rend compte que les deux joueurs placés le plus haut sur le terrain sont en situation de un contre un sur les ailes. Dans un premier temps, il fait mine de vouloir jouer long. Positionné côté gauche, l'attaquant Dominik Dobis (n°11) en profite pour effectuer un appel en diagonale de vers l'intérieur. Ce déplacement n’échappe pas à Posch, qui réussit une longue passe millimétrée dans l’axe, dans la course de Dobis. Ce dernier se fait faucher et obtient un pénalty. Est-ce la feinte de dégagement qui a déclenché l’appel ? Quoi qu’il en soit, il s'agit d'une relance intelligente et décisive de la part du gardien de but. »

À l’occasion de cette Coupe du Monde U-17, les équipes ont eu recours à différentes méthodes pour lancer leurs attaques. Sur les six mètres, il revient au gardien de but de déterminer à quel endroit il existe une chance de lancer une offensive. Il peut d’ailleurs influencer le déroulement du jeu en variant ses relances. L’utilisation des différents types de relances s’est confirmée à Qatar 2025, avec des proportions de jeu court, à mi-distance ou long équivalentes à celles d’il y a deux ans, les relances longues représentant le plus grand volume (45%).

Dans la vidéo 4, Pascal Zuberbuhler présente un extrait qui illustre la façon dont la République d'Irlande s’appuie sur une passe longue de son gardien de but pour lancer une attaque efficace.

« Leur intention est claire : les Irlandais cherchent à récupérer le ballon plus haut sur le terrain et à développer leur jeu à partir de là. On est au début de match, le score est encore de 0-0 et les Irlandais savent qu’ils peuvent compter sur la qualité du jeu aérien de leur ailier gauche, Jaden Umeh (n°11). On peut également constater que l'avant-centre Michael Noonan (n°9) se tient prêt à réceptionner la déviation et qu’il a repéré les appels des milieux de terrain Max Kovaleski (n°17) et Grady McDonnell (n°7).

Quand notre Groupe d’étude technique a observé la façon dont le Venezuela construisait face à un bloc bas, il a noté avec un intérêt particulier le rôle joué dans ce sens par son gardien de but, Angel Pérez (n°12). Bien que la vidéo ci-dessous soit extraite du match Venezuela - Haïti, il s’agit d’une approche adoptée lors d'autres rencontres.

Comme on peut le voir, Pérez monte haut et forme une ligne de trois avec ses deux défenseurs centraux. Beaucoup d'équipes construisent le jeu en s’appuyant sur une ligne de trois derrière, mais en incluant le gardien de cette manière, le Venezuela en profite pour faire monter plus haut un joueur supplémentaire.

S'agit-il d'une nouvelle évolution dans la construction du jeu à partir du gardien de but ?